Le domaine de Lisennes se situe en bordure du vaste plateau de l'Entre-deux-Mers où se côtoient vallées, églises romanes et chartreuses. Polyculture et vergers y prévalurent un temps, avant d’être progressivement remplacés par la viticulture. Une longue lignée d'hommes et de femmes écrivent l'histoire de Lisennes. L'illustre et premier propriétaire officiel fut Étienne de Baritault, avocat à la cour des Aydes de Guienne, qui en fit l'acquisition au début du XVIIIe siècle. Le domaine comprenait métairies, borderies, pâturages, bois et vignes. La petite fille d’Étienne de Baritault, demoiselle de Beaumalle, et son époux le marquis de Rabar héritent de Lisennes.
Le 9 juin 1758, Joseph de Rabar vend le domaine à Guillaume Bardon, noble bourgeois fourrier des Gendarmes de la garde ordinaire du Roi. Il entreprend la construction de l'actuelle demeure du domaine. À l’époque, les domaines viticoles s'apparentent alors plus à des « pieds à terre » pour noblesse en quête de verdure qu’à de véritables exploitations agricoles. En 1785, à l'approche de la révolution française et après le décès de Guillaume Bardon, le négociant bordelais Jean Laporte fait l’acquisition de la propriété. Nous sommes à l'aube du XIXe siècle et de l'essor économique de la filière viticole bordelaise. La demeure est d'ailleurs rénovée et prend dès lors sa forme actuelle de chartreuse.
L'embellissant, il fait installer une grille et une porte en fer forgé remarquable ornée de son monogramme (JL), toujours visible aujourd’hui. Conformément à la tradition bordelaise, négociants et marchands utilisaient la gentilhommière devenue chartreuse pour y recevoir des clients potentiels. Il meurt en 1807. Sa femme vend alors Lisennes à Étienne Delord en 1811. À la mort d’Étienne Delord, Prosper Taillefer (son associé) hérite d'une propriété de 104 hectares. Louis Chasseriaud, qui a fait fortune à Pulo-Penang dans le détroit de Malacca en Malaisie, rachète ce bien à Taillefer en 1861. Il entreprend de déboiser la propriété pour y planter des vignes.
Puis c’est Madame Ducoux, épouse d'un banquier, qui rachète le domaine. Elle continue à entretenir la propriété décrite à l’époque comme « la plus grande, la plus belle et la mieux cultivée du pays de l'Entre-deux-Mers ». Mais l'arrivée du phylloxéra et du mildiou, deux fléaux de la vigne, à partir de 1880 sonne le glas de l'âge d'or et elle doit se résoudre à vendre. William Taylor, ingénieur agricole, s’en porte acquéreur en 1899, année de surproduction viticole mais également de relance après la crise de 1880.
Après 39 ans d'exploitation, entre périodes de reconstruction, de guerre et de crise économique, William Taylor finit par vendre le château de Lisennes à Jean-Léon Soubie, le 31 août 1938.
Jean-Léon Soubie reprend avec son épouse Marie Gabrielle 82 hectares de polyculture. La présence de plusieurs cuves en ciment atteste de l'importance accordée à la viticulture par William Taylor. Pour la première fois, une famille allait durablement marquer l'histoire du domaine.